Mais où peut bien se cacher le Pétrel noir de Bourbon sur l’île ?
Pour protéger une espèce efficacement, il est nécessaire de bien connaître son habitat et ses contraintes afin de mettre en place une priorisation des zones à protéger. Mathilde Huré, étudiante en master d’Écologie terrestre de l’Université du Tampon en stage au sein du LIFE+ Pétrels pendant 6 mois, a cherché à déterminer les zones susceptibles de pouvoir accueillir des colonies de Pétrels noir de Bourbon. Ce travail est important pour adapter les stratégies de sauvegarde sur le long terme.
Afin de déterminer les territoires favorables à la nidification du Pétrel noir de Bourbon, une modélisation des sites probables de nidification a été réalisée à l’échelle de l’île. Celle-ci consiste à estimer la surface sur laquelle la présence de l’espèce est théoriquement possible. Cette étude est aujourd’hui réalisable grâce à la découverte de colonies de Pétrels noir de Bourbon en novembre 2016, nous permettant d’avoir une idée des sites favorables à la reproduction (type de sol, végétation, altitude, configuration etc). Cela a permis d’estimer environ 7 km2 d’habitats favorables répartis sur de nombreux secteurs de l’île dont trois sont avérés. Une question se pose alors, pourquoi reste-t-il si peu de colonies alors qu’il existe de nombreux habitats favorables à sa reproduction ?
La majorité des sites les plus favorables sont aujourd’hui soumis a de trop fortes pressions. Ceci est dû à l’urbanisation croissante qui implique l’introduction d’espèces exotiques envahissantes ( site du GEIR), comme les chats, les rats et les plantes invasives, impactant ainsi fortement cette biodiversité unique au monde. C’est pour cette raison que le Pétrel noir de Bourbon sélectionne des habitats refuges dans des sites très isolés qui lui confèrent une meilleure protection face à ces pressions. On retrouve ces habitats au sein de Grande-Vallée, sur la côte sous le vent de l’île principalement, dans des zones peu pluvieuses de moyenne altitude (petits plateaux en falaises, remparts, fortes pentes).
La végétation qui occupe cet espace est adaptée aux conditions extrêmes, elle ne dépasse pas les sept mètres de hauteur, avec une prédominance du Bois d’olive et du Mapou (Figure 2). Ce type de milieu est indispensable, car cela facilite l’atterrissage et le décollage des oiseaux et leur permet d’avoir un sol profond et aéré pour creuser leurs terriers qui seront maintenus efficacement par les racines des arbres .
Certains des habitats favorables à la reproduction des Pétrels noir de Bourbon ne font partie d’aucune aire protégée, une meilleure connaissance de ces espèces permet alors de mieux envisager l’avenir et de mettre en place des stratégies de protection sur du long terme. Face à la perte des habitats et à l’état des populations, ces stratégies de sauvegarde sous forme de plan national d’action permettent d’avoir une vision globale et co-construite des actions à mettre en œuvre pour sauver une espèce sur un territoire.