Des outils pour lutter contre la pollution lumineuse
On appelle « pollution lumineuse » l’altération de la lumière naturelle nocturne produite par les lumières artificielles installées en trop grand nombre ou mal orientées, concentrées principalement dans des régions fortement urbanisées. Ce sur-éclairement a un impact important sur la biodiversité en modifiant les rythmes biologiques des animaux, des plantes et des hommes. A La Réunion, comme dans d’autres îles du monde, les pétrels et puffins sont particulièrement impactés par cette nuisance..
Les jeunes pétrels sont parfois désorientés par la pollution lumineuse lors de leur premier envol de la colonie. En effet, ces oiseaux se repèrent grâce aux reflets des astres sur la mer, lorsqu’ils sont confrontés à la pollution lumineuse leurs repères sont brouillés. Pour le Pétrel de Barau, la situation géographique de ses colonies est un facteur aggravant car éloignées de la mer, . Elles sont situées sur les 3 plus hauts sommets de l’île : Grand Bénare, Gros Morne et Piton des Neiges au centre de l’île . Lors de leur trajet vers l’océan, les oiseaux sont confrontés aux lumières de la côte fortement urbanisée où le plus grand nombre d’échouages est constaté .
L’urbanisation croissante entraîne une pollution lumineuse de plus en plus importante, qui induit à son tour des échouages. Ceux-ci peuvent être massifs et concernent 2500 pétrels en moyenne chaque année dont +de 90 % sont des jeunes réalisant leur premier envol. Il s’agit d’un réel problème pour la survie des oiseaux qui se sont échoués car une fois à terre ils ne peuvent plus redécoller. Ils peuvent être alors victimes de leurs blessures, de déshydratation et sont à la merci des animaux errants (chats et chiens des villes).
Durant 8 mois, nous avons accueilli au sein de notre équipe Thiebaut Levi-Funck en master 2 de Ressources et Risques Naturels des Environnements Tropicaux (RNET) co-encadré par l’Université de La Réunion et le LIFE+ Pétrels. Il a travaillé sur la création d’un modèle prédictif d’échouage de Pétrels de Barau à l’échelle de l’île qui permet de définir des zone ou les oiseaux s’échouent le plus en lien avec la pollution lumineuse. Ce modèle a pu être réalisé en croisant les données de pollution lumineuse obtenues grâce au satellite VIIRS et les couloirs potentiels de vol des pétrels . Il permet ainsi de simuler le nombre d’échouages potentiels en fonction du territoire et de définir les zones à enjeux. Les premières analyses révèlent que près de 50 % des échouages se produisent sur une zone tampon de 400 mètres de large sur la bordure côtière.
Ce travail est un très bon outil pour sensibiliser les décideurs à la pollution lumineuse. Un atlas de pollution lumineuse est également en cours et permettra de visualiser les zones à fort enjeux écologiques afin d’accompagner les communes vers une gestion plus adaptée de leur stratégie d’éclairage. Ces outils sont indispensables pour agir à l’échelle de l’île et n’oublions pas que l’éclairage urbain peut représenter jusqu’à 40 % de la facture électrique des collectivités . Éclairer mieux c’est donc économiser !