A la recherche de notre « timize »
15 enregistreurs acoustiques ont été positionnés sur l’ensemble de l’île de La Réunion pour essayer d’entendre des cris de Pétrels noir. Plus de 10 000 heures d’enregistrements ont été collectées sur 18 sites différents. Bravo à notre équipe scientifique, cela représente des heures de marche et d’analyse !
Interview de Jérôme DUBOS, Assistant-Ingénieur recruté par l’Université de La Réunion, qui nous explique la mise en œuvre de cette action.
Comment avez-vous organisé la pose de ces enregistreurs acoustiques ?
Tout d’abord nous analysons sur une carte les zones qui nous semblent favorables par rapport à ce que l’on connaît via les témoignages, les échouages, la topographie, l’altitude et l’accessibilité des sites. Pour chaque pose d’un enregistreur acoustique, nous devons réaliser une mission de terrain que nous effectuons généralement sur 2 ou 3 jours du fait de l’inaccessibilité des sites choisis (hors sentier, remparts nécessitant des cordes, matériel à transporter) ce qui représente souvent plus de 4h de marche. En effet, si personne n’ a encore trouvé ces Pétrels noir, c’est qu’ils sont probablement là où personne ne passe! Il faut donc de l’énergie mais aussi une bonne organisation pour avoir tout ce qu’il faut une fois arrivé là-haut. Nous avons réalisé la pose de ces enregistreurs entre juillet et avril sachant que nous passons ensuite tous les mois pour changer les piles et récupérer les données. Je remercie donc vraiment tous les agents du Parc national qui ont géré la relève tous les mois de 8 enregistreurs . L’équipe du LIFE+ s’occupait pour sa part des 7 autres situés autour de Grand Bassin.
Quel matériel utilisez-vous ?
Les enregistreurs acoustiques ont été commandés chez Wildlife Acoustics qui est une entreprise américaine. Ils sont autonomes pour une durée d’environ un mois à raison de 9h d’enregistrement par nuit…
Et ils permettent d’enregistrer des cris à plus de 500 mètres !!
Comment organisez-vous les séances d’écoute et d’analyse ?
Après 58% d’analyse de l’ensemble des données, la présence du Pétrel noir a été détectée sur 8 sites, avec plus de 5400 cris enregistrés. Cela en fait des cris à écouter !
Bien sûr je n’écoute pas l’ensemble des bandes je les regarde (avec un spectrogramme) à vitesse rapide et si je vois une « signature acoustique » qui ressemble à ce que je cherche je l’écoute pour confirmer. Chaque cri détecté est ensuite intégré à notre base de données (heure, type de cris, direction, puissance….).
Au début, on a un peu les yeux qui piquent et très mal à tête, mais une fois habitué, ça passe !
De plus, ce temps-là sera bientôt fini puisque nous utilisons depuis peu un logiciel de reconnaissance automatique des sons qui nous fera gagner un temps précieux même si ce travail restera fastidieux !
Vous avez une équipe qui vous accompagne ou vous gérez ce projet de manière autonome ?
Fort heureusement j’ai de l’aide ! Un salarié du LIFE+ Pétrels, Fabien JAN et un stagiaire, Mickel-Ange CHARLETTINE m’ont beaucoup accompagné au début. En complément, 2 services civiques ont été recrutés par la SEOR et le Parc national de La Réunion ainsi qu’un stagiaire BTS-GPN, Yahïa SOULAIMANA, Pierre-Olivier ICAZE, et Swann BARBIN. Ils ont passé de nombreuses heures à écouter ces enregistrements pour m’aider dans cette étude. Un grand merci à eux ! Ils sont extrêmement motivés que ce soit sur le terrain ou au bureau. C’est réellement plaisant de travailler avec ces jeunes débordant d’énergie mais aussi passionnés par leur patrimoine et leur île. Par ailleurs, des étudiants du Master BEST ont également travaillé dans le cadre d’un TD sur l’écoute de 50 heures d’enregistrement, provenant de plusieurs sites différents. Nous sommes donc une bonne petite équipe à travailler sur l’analyse !
Nous sommes aussi en contact avec un professeur du rectorat qui souhaite faire écouter ses enregistrements à deux classes de collèges. Un projet pédagogique est en cours de construction.
Et maintenant, comment organisez-vous la suite ?
Bien que nous ayons enregistré de nombreux cris et que 2 zones semblent concentrer la majorité d’entre eux aucun cri n’a été émis au sol ce qui indiquerai la présence d’un terrier à proximité, les zones de prospection restent donc très vastes sachant que nous cherchons un trou qui devrait faire une dizaine de centimètres de diamètre dans des remparts qui par endroit font plus de 1000m de haut. Pour la saison prochaine nous allons donc intensifier le nombre d’enregistreurs acoustique sur ces 2 zones en les rapprochant les uns des autres ainsi qu’en les plaçant à des altitudes différentes. En fonction des résultats des analyses effectuées tous les mois nous les déplacerons pour espérer enfin définir une zone restreinte où nous pourrons espérer trouver des terriers grâce à des prospections de terrain accompagnées de nos sniffer dog spécialisés et de nos jumelles thermiques.
Un mot pour conclure ?
« Je remercie les quatre secteurs du Parc national de La Réunion pour leur implication et plus généralement à l’ensemble des agents qui ont participé ! Merci à tous »